La communauté catholique à Agaléga, qui fait partie du diocèse de Port-Louis, a célébré le jeudi 8 septembre les 125 ans de présence de l’Eglise dans l’île. C’est la première fois que les fidèles commémorent l’arrivée des premiers missionnaires chez eux.
Il s’agit d’un événement majeur dans l’île, empreint d’émotions fortes. Malgré les visites espacées des prêtres dans l’archipel à cause de certaines contraintes, les Agaléens ont su maintenir la flamme de leur baptême. Mais pour cet anniversaire ils sont heureux de la présence du Père Michel Moura qui connait bien l’archipel pour y avoir exercé comme fonctionnaire pendant quelques années avant son entrée au séminaire.
L’Ile Agaléga, située à un millier de kilomètres de sa grande sœur, est composée de deux ilots, à savoir l’Ile du Nord et l’Ile du Sud. Concernant le début du travail de l’Eglise dans l’archipel, on apprend du livre de R.P Dussercle (C.S.Sp) ayant pour titre « Agalega – Petite Ile », que le premier missionnaire est arrivé dans l’ile vers le 20 août 1897 et que celui-ci était un prêtre jésuite du nom de Victor Malaval.
Mais son travail missionnaire a débuté officiellement avec l’installation et l’inauguration d’une croix le 8 septembre 1897 dans l’Ile du Sud car celle-ci était à l’époque l’ile principale de l’archipel en raison de l’endroit pour le mouillage des bateaux. Le Père Malaval avait placé ce travail missionnaire sous le regard de la Vierge Marie car sur le socle de cette croix indiquant la date il avait fait inscrire aussi l’appellation « Notre-Dame-De-Bon Espoir ».
Jusqu’à la fin des années 90 l’archipel comptait environ 1500-2000 habitants et par la suite la population a diminué drastiquement avec la migration des jeunes et des familles vers Maurice pour raisons professionnelles et à cause d’autres facilites qui existent ici. Aujourd’hui, il y a entre 350-400 habitants au total dans les deux iles tandis que le nombre de fidèles catholiques ne dépasserait pas la barre de 250.
Contre vents et marées, la petite communauté des fidèles catholiques a tenu ferme dans sa foi. Un anniversaire est souvent le temps d’un bilan. Que représente cette célébration de 125 ans de la mission pour eux ? « Les premiers missionnaires ont ouvert un chemin d’espérance parce que nos ainés croyaient dans certaines superstitions. Cela n’a pas été toujours facile parce que nous n’avons pas de prêtre en permanence chez nous mais grâce à la persévérance de nos ainés et le dévouement des laïcs nou finn tini ferm dan nou lafwa. Nous célébrons ces 125 ans avec une joie profonde et une grande fierté», témoigne Emmanuel Jasmin, un des responsables du « Noyau Pastoral ».
Les témoignages recueillis tendent dans la même direction : la communauté catholique, guidée par « Notre-Dame- de - Bon Espoir » a parcouru ces 125 ans avec foi, détermination et espérance.
Il est bon de souligner que le manque de facilités concernant le transport entre Maurice et Agaléga et le manque de prêtres ne permettent pas au Diocèse de Port Louis d’envoyer un membre du clergé en permanence dans l’ile. Toutefois pour les principales fêtes figurant au calendrier liturgique, comme par exemple pour la célébration de la Pâques et de la Noel, un prêtre y est présent. Et durant son séjour celui-ci en profite pour célébrer des mariages, des baptêmes, des premières communions et confirmations et pour animer aussi des sessions de formations.
Mais cette absence de prêtres n’a pas pour autant freiné la vie de l’Eglise dans l’archipel. Le « Noyau Pastoral », composé d’une quinzaine de personnes nommées par l’évêque de Port Louis, a la responsabilité des différentes célébrations religieuses sur une base régulière et de l’organisation de certaines activités aidant à renforcer les liens de fraternité entre les habitants. Deux religieuses de la Congrégation des Filles de Marie en font partie depuis quelques années. « Il y a une belle page de l’histoire de l’Eglise dans l’ile », soutiennent les membres du noyau pastoral. « Les prêtres et les religieuses qui sont venus en mission ont contribué chacun à sa manière, à façonner l’Eglise à Agalega. Sakenn avek so talan, so personalite finn amen so blok pou ki mision-la kontigne e ki nou avanse», selon cette équipe.
La mission de l’Eglise Catholique dans l’archipel est allée au-delà de l’évangélisation et de la construction des chapelles et d’une maison diocésaine. «L’Eglise Catholique a son empreinte dans le domaine de l’éducation à Agalega ! », rappelle avec vigueur Emmanuel Jasmin.
Pour la note historique, l’ouverture de la première école primaire à Agalega en janvier 1972 - exactement 50 ans de cela - était une initiative du diocèse de Port-Louis. La Roman Catholic Education Authority avait alors fait appel au couple Hervé et Susy Sylva pour se rendre dans l’ile pour lancer cette école et ils y sont restés pour une très longue période en a laissant de beaux souvenirs dans le cœur de nombreux habitants. Et certains d’entre eux n’hésitent pas à leur donner le qualificatif « missionnaires de l’éducation » tant leur dévouement dans ce servie a été remarquable.
Par la suite, d’autres enseignants se sont relayés pour continuer la mission de l’Education catholique jusqu’à ce que le ministère de l’Education décide de prendre en charge l’éducation primaire dans l’archipel. Plusieurs habitants se remémorent avec une note de nostalgie l’apport de l’Education catholique dans la vie de l’ile et au plan social.
« Dans son projet éducatif pour Agaglega, l’Eglise avait intégré aussi un volet de formation pour les jeunes et les parents avec pour objectif le développement personnel et l’épanouissement de chaque individu. Les éducateurs à cette époque ont entrepris aussi un travail social formidable en dehors de l’école et cela a eu un impact positif dans la population», se souvient Emmanuel Jasmin ayant bénéficié lui-même de l’encadrement de l’Education catholique pour son parcours scolaire.
Au bout de ces 125 ans, la communauté catholique a le regard tourné vers l’avenir. Le Noyau Pastoral se fait le porte-parole des fidèles pour des requêtes en direction du diocèse de Port-Louis et met l’accent sur « la nécessité d’une collaboration concrète» pour les années à venir.
S’il y a eu une belle mobilisation des laïcs jusqu’ici pour maintenir la flamme du baptême, le noyau pastoral est néanmoins d’avis qu’il serait bon maintenant, avec la fréquence des voyages des bateaux vers Agaléga d’avoir la présence d’un prêtre ou d’un diacre régulièrement durant l’année dans l’Ile. « Il y a eu beaucoup de changements dans la société agaléenne et certaines nouvelles réalités ont eu un impact sur la vie de l’Eglise. La mission est confrontée à de nouveaux défis et une présence permanente de prêtre sera d’un grand réconfort pour les fidèles », disent les responsables du Noyau. Et avec une note espérance, ils expriment leur souhait pour l’émergence de vocations religieuses dans l’ile à l’avenir. « Nous allons prier pour que les jeunes entendent l’appel du Seigneur ».
Au volet social, les fidèles à Agalega souhaitent une participation de l’Eglise dans le domaine de l’éducation, particulièrement au niveau de l’éducation secondaire ainsi que dans le domaine de la formation professionnelle pour les jeunes ne pouvant aller au-delà de la Grade 9.
La croix en fer forgée placée par le père Malaval en 1897 en ouvrant la page de la mission de l’Eglise dans la petite ile a subi l’usure et s’est beaucoup détériorée au fil des années en raison des intempéries. Mais elle est toujours fermement ancrée dans la terre de l’Ile du Sud, comme un témoignage de la foi solide des fidèles. Toutefois pour marquer ces 125 ans, la communauté catholique a installé une nouvelle croix qui a été bénie par le Père Moura juste après la messe anniversaire le jeudi 8 septembre, symbolisant par là-même la continuité et sur un ton de renouveau la belle mission de l’Eglise à Agaléga
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