Le père Philippe goupille, président du Conseil des Religions, était l’invité d’honneur au Graduation Ceremony de l’Université de Maurice le 31 août dernier. Le père Goupille a saisi l’occasion pour parler de la place des religions à l’université d’autant plus que depuis 2010, un cours menant au Diplôme est proposé dans la Faculté de Sociologie.
Il s’est interrogé sur le fait qu’il y a très peu d’étudiants qui s’inscrivent et a poussé la réflexion sur le but de l’éducation universitaire dans le contexte actuel.
Ci-dessous, l’intervention du père Goupille :
Chancellor, Dr Louis Jean Claude Autrey
Vice-Chancellor, Professor Sanjeev Kumar Sobhee
Pro-Vice Chancellors, the Registrar
Members of the Congregation
Distinguished academics
Distinguished guests
Graduands
Ladies and Gentlemen
Chers amis,
Je suis vraiment très heureux d’être parmi vous et je vous remercie vivement de votre invitation ce matin.
Je voudrais en commençant faire mémoire du Professeur Jugessur qui était Vice Chancelier de l’Université et qui a permis au Conseil des Religions d’introduire un parcours menant au Certificat et plus tard au Diplôme en « Peace and Conflict Studies ». Je remercie aussi le professeur Sobhee qui nous a accueillis à l’époque dans la Faculté de Sociologie avec aussi Mme Deepa Gokulsingh. Depuis 2010 !
Nous avons du mal à recruter des étudiants pour s’inscrire en vue d’obtenir le diplôme et la question qui nous est posée est la suivante : « Est-ce que ce diplôme va me permettre de trouver un emploi ? ». J’ai longuement réfléchi à ce problème qui m’amène à partager aujourd’hui avec vous une vision de la nature de l’Université qui a été explicitée par John Henry Newman dans une série de discours publiés en 1859 sous le titre « The Idea of a University ». John Henry Newman était un prêtre anglican, Fellow de Oriel College à Oxford où il se plaisait beaucoup comme enseignant et comme tuteur. Quand la direction de l’Université d’Oxford a voulu supprimer le système de tuteur, Newman s’est opposé à cette mesure et s’est plongé dans la lecture des grands penseurs et philosophes qui ont façonné la pensée occidentale. Ayant rejoint l’église catholique entre temps, Newman fut invité par les évêques irlandais à fonder à Dublin en Irlande une Université Catholique. C’est à ce moment-là qu’il a exprimé sa vision de ce que devrait être une université idéale.
The search of truth
Newman affirme que le dénominateur commun entre toutes les facultés qui se trouvent dans une université, c’est-à-dire la médecine, l’ingénierie, la comptabilité, les études de commerce, etc., sont liées entre elles par une option fondamentale qui est la recherche de la vérité. Donc dans son université idéale, Newman affirme qu’il doit avoir une interaction constante entre les différentes facultés, puisque toutes les disciplines sont orientées vers la recherche de la vérité. Aucune discipline ne peut prétendre à posséder toute la vérité. C’est dans l’interaction des disciplines qu’on peut s’approcher le plus d’une définition de la vérité.
Philosophical knowledge its own end
C’est alors que Newman introduit une nouvelle manière de former les étudiants dans leur parcours universitaire. Il insiste pour qu’il y ait une formation de l’esprit humain qu’il appelle « philosophical knowledge ». Attention ! il ne s’agit pas là de l’étude de la philosophie, il s’agit de former l’esprit humain et de développer ses capacités de raisonnement, d’analyse, de jugement.
« Knowledge is capable of being its own end. Such is the constitution of the human mind that any kind of knowledge if it be really such is its own reward.”
Par « esprit philosophique » Newman veut dire :
« That special philosophy which I have made to consist in a comprehensive view of truth in all its branches of the relations of science to science, of their mutual bearings, and their respective values. What the worth of such an acquirement is, compared with other objects which we seek, wealth or power or honour or the conveniences and comfort of life, I do not profess here to discuss, but I would maintain and mean to show that philosophical knowledge is an object in its own nature really and undeniably good.”
Newman continue en disant que la formation de ce qu’il appelle “philosophical knowledge” est une dimension fondamentale aussi nécessaire à l’être humain que de manger, de dormir, de se vêtir, de soigner son corps. Pour illustrer concrètement ce qu’il veut dire, Newman a recours à deux manières d’envisager la formation de l’étudiant. Alors que le grand penseur et avocat romain Cicéron se fait l’avocat de l’étude et de la lecture des grands philosophes grecs, son rival Cato prend un chemin contraire. Cato estime que toute formation universitaire doit être évaluée selon ce qu’elle rapporte :
« The fit representative of the practical people Cato estimated everything by what it produced. Whereas for Cicero the pursuit of knowledge promised nothing beyond knowledge itself ».
Le pourquoi d’enseigner les religions à l’Université
C’est justement en me basant sur cette conception philosophique de la formation de l’esprit humain que je me propose de justifier la place de notre cours à l’université de Maurice. L’objectif principal d’étudier les grandes religions qui existent à Maurice n’est pas uniquement historique. Il s’agit d’aider l’étudiant à s’arrêter pendant quelques heures pour réfléchir aux questions fondamentales qui concernent l’homme, son origine, sa destinée.
- Qui est l’homme ? D’où vient l’homme ? Comment trouver le bonheur ? Comment former sa conscience morale ?
Ce sont des questions fondamentales auxquelles les différentes religions dans l’histoire de l’humanité ont essayé de répondre, chacune à sa manière.
Mes chers amis, il y a là une dimension capitale pour le développement d’un étudiant et pour l’impact qu’il aura plus tard dans sa vie de famille, dans son travail, dans ses relations avec les autres.
Ici à l’ile Maurice nous avons la chance d’être sur un poste d’observatoire exceptionel par rapport à ce que les religions peuvent apporter à l’enrichissement de l’intelligence humaine. Dans la pensée occidentale nous avons des philosophes tels que Socrate et Aristote qui ont posé ces questions fondamentales et qui ont influencé des religions telles que le christianisme d’une manière incontournable. Un de nos professeurs, le Dr Jonathan Ravat, dont la spécialité est l’étude des différentes écritures sacrées, me faisait remarquer qu’il y aurait toute une convergence à découvrir entre la philosophie d’Aristote et les écrits sacrés hindous que l’on trouve dans les Upanishads. Rechercher une convergence entre Aristote et les Upanishads. Si j’étais plus jeune j’en aurais fait un sujet de thèse car c’est à travers ce genre de recherches, de convergence entre la pensée occidentale et la pensée orientale que l’Université devient un lieu privilégié pour rapprocher les cultures, rapprocher les religions, rapprocher les humains et bâtir la paix sociale dans le respect de chacun dont notre monde rêve en ce temps de guerre, de violence, de destruction.
Conclusion
En terminant, je prie de tout mon cœur pour que l’Université de Maurice devienne ce laboratoire qui permettra l’étude de la relation entre l’esprit humain et la vérité. Le laboratoire pour l’étude des convergences entre les écritures sacrées qui nous proposent une vision de l’homme, et de sa destinée.
Mes chers amis, je vous remercie de votre patience. Mais le temps n’est-il pas venu de dépasser le « pratico pratique » pour donner du temps à la formation d’hommes et de femmes qui viendront illuminer leur pays simplement parce qu’ils ont développé ce que Newman appelle « philosophical knowledge its own end ».
Père Philippe Goupille
Président
Conseil des Religions
APPENDIX
Aristote
Newman says : « Do not suppose that in thus appealing to the ancients I am throwing back the world 2000 years and fettering philosophy to the reasonings of paganism. While the world lasts, will Aristotle’s doctrine on these matters last or is the oracle of nature end of truth? While we are men we cannot help to a great extent being Aristotelians for the great Master does but analyse the thoughts, feelings, use, and opinions of human kind. He has told us the meaning of own words and ideas before we were born. In many subject matters, to think correctly is to think like Aristotle; and we are his disciples whether we will or no, though we may not know it.”
“I consider then that I am chargeable with no paradox when I speak of a knowledge which is its own end, when I call it liberal knowledge or a gentleman’s knowledge, when I educate for it, and make it the scope of the university.”
“When I speak of knowledge I mean something intellectual, something which grasps what it perceives to the senses, something which takes a view of things; which sees more than the senses convey; which reasons upon what it sees and while it sees; which invests it with an idea.”
“Philosophical knowledge is not a mere extrinsic or accidental advantage, which is ours today and another’s tomorrow, which may be got up from the book and easily forgotten again. If we can borrow for the occasion, carry about in our hand and take into the market; philosophical knowledge is an acquired illumination, it is a habit, a personal procession, an inward endowment. And this is the reason why it is more correct to speak of a university as a place of education rather than of instruction. Education is a higher word than instruction, it implies an action on our mental nature and the formation of a character; it is something individual and permanent and is commonly spoken of in connection with religion and virtue.”
Lundi à vendredi
08h00 à 16h00
Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
13 Rue Mgr-Gonin
Port-Louis
Brand online by Nova Interaction