Le Cardinal Piat fait état de sa tristesse et de son inquiétude pour le pays

Au moment d’entrer dans la Semaine Sainte, le Cardinal Piat s’est inspiré de l’image de Jésus qui pleure devant la ville de Jérusalem pour dire sa tristesse devant notre pays où « les fondations de notre démocratie sont ébranlées ». Le Cardinal Piat fait part de sa souffrance pour le pays et exprime son inquiétude concernant la prolifération de la drogue et l’indépendance des institutions. Mgr Maurice E. Piat évoque spécifiquement les interrogations autour d’un dossier brûlant d’actualité, sur le trafic de drogue.

 

Mais, comme Jésus qui n’est pas resté sur la colline pour dire sa tristesse mais est descendu dans la ville de Jérusalem, l’évêque lance un appel aux Mauriciens pour « devenir acteurs et apporter une contribution pour la paix dans notre pays ».

 

L’intervention du Cardinal Piat a été diffusée, jour du dimanche des Rameaux, sur la MBC Senn Kreol ce dimanche 02 avril à 20h30, lors de son enseignement hebdomadaire autour de la Lettre Pastorale. Nous proposons ci-dessous la version française du message qui a été enregistré en créole.

 

Aujourd’hui l’Eglise célèbre le dimanche des Rameaux, où nous faisons mémoire d’un évènement qui s’est passé quelques jours avant la mort et la résurrection de Jésus.

 

Jésus avait quitté la Galilée et voyageait à pied jusqu’à Jérusalem où il allait célébrer la fête de la Pâques avec ses disciples.

 

Avant de rentrer dans la ville, Jésus et ses disciples arrivent sur une colline appelée « Mont des Oliviers ». Il décide de s’arrêter là et de contempler la ville. En contemplant Jérusalem, son grand temple, ses monuments, et en pensant au peuple qui vit dans cette ville, Jésus pleure.

 

Jésus est triste car les habitants de Jérusalem n’ont pas compris son message de paix. Il voit le grand malheur qui s’abattra sur la ville parce qu’ils n’ont pas reconnu l’importance de sa visite et de son message.

 

Moi aussi je suis triste, je pleure quand je regarde mon pays. Tout le monde désire et recherche la paix dans notre pays. Mais comment pourrons-nous avoir la paix dans une démocratie lorsqu’il y a un manque de respect pour la séparation des pouvoirs, quand certains se permettent de critiquer les décisions d’un magistrat, d’un DPP. Je pleure quand je vois que l’indépendance des institutions est menacée, que les fondations de notre démocratie sont ébranlées.

 

Comment pouvons-nous avoir la paix lorsqu’une communauté est insultée par un chant méprisant à leur encontre ? J’avoue que je suis triste et inquiet pour mon pays lorsque je vois que l’injustice et la corruption sont tolérées. Prenons le cas de quelqu’un qui a été accusé, condamné pour le trafic de la drogue à La Réunion. Les autorités réunionnaises envoient un dossier à Maurice pour en informer les autorités locales et leur demander de faire le nécessaire et ce dossier reste dans un tiroir pendant un an et demi !

 

Pendant ce temps, imaginons la quantité de drogue qui est rentrée à Maurice, le nombre de jeunes qui ont vu leur vie détruite à cause de ça, combien de papas et de mamans pleurent et souffrent ? de plus, la corruption menace sérieusement l’indépendance de la police et malheureusement (même s’il y a de bons éléments intègres dans la police) la confiance de la population envers les forces de l’ordre est ébranlée. Or, la confiance est la clé pour la stabilité sociale dans un pays.

 

Quand je vois tout cela, j’ai envie de pleurer. Certes, il y a beaucoup de côtés positifs, de vraies valeurs dans notre pays, mais je pleure parce que justement ces valeurs, la dignité et la beauté de notre pays se dégradent.

 

Cependant, lorsque du haut de la montagne, Jésus contemple Jérusalem il ne reste pas en haut. Il descend dans la ville pour rejoindre son peuple. La foule l’acclame mais le lendemain, le rejette. Les autorités, infiltrées dans la foule, ont persuadé la foule de demander que Jésus soit arrêté, condamné et crucifié.

 

Même s’il sait qu’il va souffrir, Jésus continue à enseigner dans le temple et lorsque les soldats l’arrêtent, il accepte de prendre sa responsabilité. Son but est de rester fidèle à sa mission, apporter la paix à ce peuple qu’il aime et pour lequel il est disposé à souffrir. Jésus est motivé par un grand sens du service et un amour qui lui donne du courage.

 

Comme Jésus, nous aussi nous ne pouvons pas, du haut de notre balcon, regarder ce qui se passe, manz pistas get cinema, et nous contenter de partager des commentaires sur les réseaux sociaux. Nous ne pouvons pas rester spectateurs. Nous devons devenirs des acteurs et apporter notre contribution pour la paix dans notre pays. Nous devons le faire par amour pour notre patrie, pas pour notre intérêt personnel. Sans l’amour de notre pays, sans engagement de notre part, notre pays sombrera.

 

Pour avoir le courage de devenir acteurs, nous devons avoir un sentiment d’appartenance au peuple mauricien, nous devons sentir que nous avons une destinée commune et que nous sommes solidaires. Même si nous avons des origines ethniques différentes, même si nos ancêtres ont débarqué à Maurice dans des conditions différentes – certains dans la souffrance et d’autres dans de meilleures conditions -, chaque groupe a contribué, à sa manière, à la construction du pays.

 

C’est pourquoi aujourd’hui nous devons être reconnaissants les uns envers les autres ; nous devons aimer ce peuple et toutes ses composantes, avec ses différences, ses faiblesses, ses valeurs. L’aimer pas seulement quand nous gagnons une compétition sportive mais l’aimer avec le désir de nous engager pour soigner ses maladies, soulager ses souffrances. Donner un coup de main pour le faire avancer comme un peuple digne.

 

Quand Jésus descend du Mont des Oliviers pour entrer dans Jérusalem, il savait qu’il allait porter sa croix. Il l’accepte, par fidélité mais aussi parce qu’il sait que son témoignage sera fécond. Son témoignage est comme une semence déposée en terre, qui va bourgeonner et porter du fruit. Il sera rejeté, condamné à mort mais après sa mort, il ressuscitera et l’on reconnaîtra qu’il avait eu raison. Le témoignage de Jésus porte encore du fruit aujourd’hui, il nous donne courage et espérance.

 

Si aujourd’hui, nous aussi désirons que notre pays retrouve sa dignité et si nous décidons de descendre sur le terrain, de travailler pour la paix et la justice, il y aura des personnes qui ne seront pas contentes ; nous aurons besoin de porter notre croix nous aussi. Mais comme Jésus, nous devons avoir confiance : le travail pour la paix et la justice sont comme des petites semences qui porteront du fruit à l’avenir.

 

Etre artisan de paix aujourd’hui dans notre pays veut dire non pas seulement dénoncer la corruption et l’injustice mais aussi ne pas nous laisser tenter nous-même par l’argent facile, l’argent sale, les passe-droits.

 

Notre rôle est aussi de prendre des initiatives positives où des personnes de différentes communautés peuvent collaborer dans des projets de solidarité comme Lakaz l’Espwar à Solitude ou comme « Foodwise », ou des projets écologiques comme « Tiny Forests » ou des projets de potagers communautaires comme à Ferney, ou encore des projets de remedial education et d’accompagnement scolaire.

 

Ces petites initiatives nous montrent concrètement qu’une autre île Maurice est possible, lorsqu’un accueil mutuel entre communautés, une solidarité, un travail en commun sont possibles et existent. Malheureusement, cette facette de l’île Maurice est souvent endormie ; notre responsabilité est de la réveiller et de montrer concrètement comment cette manière de vivre apporte la paix, la joie, le développement, la dignité.

 

Beaucoup d’autres projets peuvent se concrétiser si nous nous y mettons sérieusement et laissons battre notre cœur pour notre pays. A l’approche de Pâques, demandons à Jésus de réveiller en nous ce sens du service pour notre peuple et ce désir de marcher ensemble. Faisons lui confiance et marchons avec lui sur son chemin de croix et de résurrection.

 

+ Cardinal Maurice E. Piat

Evêque de Port-Louis

Event Date:

Media:

Inscrivez-vous à notre Newsletter

Évѐque de Port-Louis
  • Lundi à vendredi
    08h00 à 16h00

  • Tel: 208 30 68
  • Fax: 208 66 07
  • Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

  • 13 Rue Mgr-Gonin
    Port-Louis


Copyright 2022 | Le Diocèse de Port-Louis |  Terms and Conditions |  Privacy Policy

Brand online by Nova Interaction